Khrung, dernières nouvelles

Améthiste était seule en la demeure des Cœurs Libres en ce doux matin du 12 Mars, réfléchissant au bon déroulement du mariage et revérifiant dans sa tête pour la énième fois si personne n’avait été oublié pour la cérémonie. Bien qu’elle refusait de l’avouer aux autres, elle était atrocement stressée. Soudain, un bruit sec vint interrompre ses comptes, rapidement suivi d’un second, puis d’un troisième ; quelqu’un frappait à la porte.
Elle monta sur le tabouret posé prêt de la porte prévu à cet effet afin de jeter un œil par le judas mais ne vit personne. Quand elle ouvrit enfin, elle aperçu un jeune hobbit d’une quarantaine d’année tout au plus, la mine triste et dans un état de fatigue plus qu’apparent. Lorsqu’il la vit, il se contenta de sourire avant de s’écrouler sur le pas de la porte.

Il revint à lui quelques heures plus tard, allongé dans la chambre à l’étage. Au grand étonnement d’Améthiste, ses premiers gestes furent de fondre sur son sac à dos et d’en sortir un carnet en piteux état.

- Voici la raison de ma venue dame. Je l’ai trouvé à bien des miles d’ici dans un sac abandonné et j’ai comprit en le lisant que son possesseur aurait souhaité qu’il parvienne ici. J’ai désormais la conscience tranquille.

Sans un mot, Améthiste prit dans ses mains le livret avec un sentiment de curiosité mêlé à une forme de peur qui lui était étrangère. L’écriture lui était familière et, oubliant son invité, elle se mit à lire :


29 Décembre : La confrérie des dragons noirs est de nouveau sur mes traces. Cela fait 3 jours qu’ils me recherchent depuis que j’ai quitté cette saloperie de Fondcombe en direction du Nord. Je crois bien les avoir distancé d’une bonne demi-journée mais je crains qu’ils me retrouvent d’ici peu, le temps calme et la neige étant pour moi un handicap certain. Je poursuis mon voyage vers l’ancienne trésorerie d’Helegrod dans le but de bifurquer vers l’Est en espérant leur faire perdre ma piste.

02 Janvier : Mon plan a échoué. J’ai été contraint d’affronter un petit groupe de montagnards attirés par mes possessions et il est certain que le combat a laissé suffisamment de traces pour que ma route soit aisément pistée. Je continue néanmoins ma route vers l’Est comme prévu dans l’espoir de les perdre dans les bois au nord de Gabilazan.

12 Janvier : Ils m’ont retrouvé et me repoussent vers le nord. J’ai réussi à échapper aux campements gobelins mais une sentinelle m’a trouvé sur le pont et je suis blessé à l’épaule. la plaie n’est pas profonde mais je crains plus l’infection, la lame étant rouillée.

15 Janvier : Le froid commence à se faire sentir bien comme il faut, ainsi que la faim. Je rêve de grandes tablées couvertes de viande en sauce, de pain blanc et de vin aux épices, accompagnées de discutions décousues avec Norodoin, Améthiste, et les autres Cœurs Libres. Lirwen me manque terriblement et je crains de ne plus la voir. J’ignore si les dragons noirs sont toujours à ma poursuite mais les immondes peaux-vertes sont aux aguets et semble vouloir faire de ma personne un exemple et un repas. Toutefois je ne périrais pas sans combattre et j’entends bien en emporter quelques uns dans l’au-delà avec moi.

Améthiste était plongée dans la lecture de son récit à tel point qu’elle ne remarqua pas le postier qui était en train de faire un véritable pillage des réserves de nourriture et de vin. L’encre était désormais rouge, donnant au récit une tonalité dramatique intense.

26 Janvier : Ils sont sur mes traces. Je pense qu’ils me poussent vers une destination précise mais je n’ai pas d’autres choix que de foncer tête baissée dans leur piège grossier. Je n’ai jamais vu une telle organisation au sein de la horde et le danger est bien plus grand qu’auparavant. Je promets si je m’en sors de revenir en de meilleures conditions et en compagnie de mes compagnons pour défaire le roi gobelin et toute sa garde, aussi féroce et nombreuse qu’elle puisse être.

Février : J’ai perdu le compte des jours. Je suis dans un dédale immense farcit de gobelins. Fort heureusement ceux que j’ai croisé n’étaient pas des guerriers et n’ont pas opposé une véritable résistance. Toute retraite m’est hélas impossible et comme je le craignais, ma blessure s’est infectée. J’ai été contraint de me séparer d’une de mes spalières.

XXX : L’alerte a été donnée. J’ai la cuisse gravement entaillée et l’abdomen perforé. Je ne sais pas où je me trouve ni comment sortir. Je t’aime Lirwen.

XXX : J’ai réussi à sortir de cet enfer puant. La tempête souffle. Les ouargues sont après moi. Je vais mourir. Pardon d’avoir échoué.


Le récit s’arrêtait là. Les derniers mots avaient dû être difficiles à écrire et l’émotion qui en émanait avait poussée les glandes lacrymales d’Améthiste à leur limite. Un mélange de tristesse et de colère l’avait envahit, ce qui eut comme premier effet de faire céder ses jambes sous le poids de ce ressentiment.
Une bonne minute s’écoula avant qu’elle reprit ses esprits et chercha celui qui avait amené jusqu’à Falathorn ce récit. Il expliqua calmement qu’il avait trouvé un sac de voyage déchiqueté près du bassin de Caldwell, un peu plus au sud. Il comportait quelques fioles brisées, des parchemins divers, une broche et ce carnet. Il rendit également la broche à la demande du chef des Cœurs Libres, c’était assurément celle de Khrung, reconnaissable à l’entaille qu’elle avait reçue lors d’une mission à Urugarth.

Le postier fut remercié et dédommagé pour le service, et impliqué d’une autre mission, bien moins dangereuse mais toutefois importante : Prévenir les Cœurs Libres qu’un rassemblement était souhaité.

Plein hiver, les vents battent les sommets et les cols escarpés des monts brumeux. J'ai fait l'Est, pas de traces de mon ami chez les nains de Gabilazan, de même que dans la toundra du Sud et chez les monts des géants (c'est pourtant là qu'il aurait passé le plus inaperçu, selon moi, mais bon).
Cela fait maintenant un mois et 12 jours que je soulève monts et vallées afin de retrouver Khrung, guidé par le foutre de bazar laissé sur son passage... La bonne nouvelle, c'est que ses poursuivants de la guilde du Dragon Noir on abandonné la traque, ou temporairement en tout cas. La mauvaise, c'est que comme eux, j'ai perdu sa trace à Goblinville. Mmh, je contourne.

8 jours plus tard. Je met la main sur un objet équivoque : Une épaulière, gravée à son nom avec quelques menaces de mort adressées à tout éventuel roublard... Ainsi que du sang éclaboussé sur des troncs d'arbres. Je remonte sa piste.

2 jours encore. Le blizzard souffle à plein poumons, on voit pas à 3 mètres, je me dirige sur une piste à nouveau incertaine et
à l'aveuglette de surcroît, grosso modo vers le camp de Thorgest.
J'entends quelque chose, des hurlements portées par le vent, plein sud... des ouargues. Je lance la chasse.

J'ai abattu les toutous restants, ils y en a un sacré paquet et certains cadavres ne sont pas de mon fait. En tout cas, ça me fait une piste toute fraîche. Le sang brille encore dans la neige.
J'aperçois une forme dans le brouillard... Ah !

Quelques heures plus tard. Je le tiens enfin, il est dans un sale état, baveux gaga et le flan percé, mais toujours en vie.
Je le soutient et nous courons, car il semblerait qu'on ai suivi ma trace afin de remonter jusqu'à lui.
Nous arrivons en vue du camp de Thorgest. Enfin !

Est ce que vous visualisez le moment ou vous vous réveillez le matin après une soirée particulièrement arrosée?
Je parle de la difficulté que vous avez à sortir de ce stade où vous vous trouvez entre le monde des rêves et le monde réel.
Et bien imaginez maintenant que cet état dure toute une journée et vous saurez dans quel état de confusion Khrung se trouva à son "réveil". Même éveillé, il eut du mal à s'habituer à ce nouvel entourage. Son dernier souvenir le plaçait en très mauvaise posture, blessé bien comme il faut en train de pisser le sang dans la tempête pour échapper aux ouargues. C'est ptet qu'il était mort...mais dans ce cas les prêtres l'avait bien arnaqué toute sa vie durant. Au lieu d'un monde doux et calme où aucun autre besoin que celui de rien branler ne vous assaille l'esprit, il se trouvait dans une masure de pierre mal isolée, ses blessures lui faisant un mal de chien et son ventre quémandait tant à manger qu'il aurait même avalé de la salade pour le calmer. Voire peut être même un radis!

Au bout de quelques secondes, Khrung constata qu'il n'était pas seul dans la pièce. En effet, un tas blotti sous une couverture dans un coin de la pièce ronflait. Fort. Les murs en auraient tremblé que Khrung n'en aurait pas été étonné.
Tant bien que mal, le nain s'approcha du tas en question. Quelle fut sa surprise quand il s'aperçut qu'il ne s'agissait pas d'un monstre horrible mais bel et bien de son compagnon d'armes Beolho (mais Beolho n'est il pas un monstre horrible? Mmh pas si sûr...). Empli de joie et de soulagement, Khrung lui fit un réveil à la naine.

Pour ceux qui ne connaitraient pas ce procédé, il est d'une simplicité et d'une efficacité troublante. Il suffit d'attraper les épaules du cobaye et de secouer de toutes ses forces. Pour les puristes du sommeil, il est possible de faire heurter le crâne avec le sol ou le coin du lit pour un bonus en efficacité du plus bel effet.

(Note: le cobaye est rarement de bonne humeur après ça)

Beolho se réveilla aussi sec (je vais te crever charogne!!!) et, comme par réflexe, envoya son poing dans la face de Khrung. Ce réflexe en était il vraiment un? les deux compagnons dissertent toujours à ce sujet depuis lors.


Khrung et Beolho restèrent quelques jours supplémentaires ici, le temps de se retaper un peu (j'opte bien entendu pour un point de vue parfaitement médical). C'est finalement le 3 mars qu'ils reprirent la route pour la ville de Bree.



Depuis cet épisode, Khrung l'a vraiment mauvaise envers les dragons Noirs et les gobelins. Et les ouargues aussi. Puis les elfes, ne l'oublions pas. Et les apiculteurs aussi. Sans omettre les chèvres, les dragons, les fées, les fourchettes à trois dents, les timbales de la taverne du dragon ivre, la bière frelatée, le thé, les elfes (c'est pas une redite, il les hait deux fois plus, c'est tout), les trolls et la mère de Lirwen qui l'emmerde pour manger de son immonde tourte aux poireaux et aux asperges.

CA VA CHIERRR !!!

Personne...Khrung se trouvait devant la maison des Cœurs Libres mais elle semblait totalement vide de vie. La porte était scellée et un petit panneau était planté au beau milieu du jardin avec un truc écrit en elfique. Il avait cherché à connaître l'elfe parlé afin de pouvoir insulter les oreilles pointues de vive voix mais l'écrit...toutes ces lettres qui se ressemblent et la ponctuation l'avait découragé pour 200 ans.

- Mais bordel ou est ce qu'ils sont tous passés? OU EST MA FEMME? Eh toi viens voir par là!

Il s'agissait du nouveau voisin qui, répondant à son instinct le plus primaire, s'enfuit s'enfermer vers sa maison. S'était sans compter sur les talents de "lanceur de marteau à deux mains sur les petits fuyards". Les 20 kg d'acier fendirent l'air pour finir leur course dans les omoplates de l'elfe.

Quelques baffes plus tard (pour le ranimer hein), l'elfe vit le visage du nain en gros plan et chercha à mettre le plus de distance entre eux. En l'occurrence il ne put que chercher à s'enfoncer dans le sol, ce qui est rarement efficace.

- Excuse moi mais ils sont passés où les Coeurs Libres?
- Les...leslesleslescoeurslibres? jjjjje sais pas, ils sont partis deux semaines après mon arrivée. Mais voyez plutôt avec l'agence de logement des résidence de Falathorn, ils seront surement en mesure de vous renseigner.
- ok merci, j'y vais de ce pas. Et restez pas allongé dans l'herbe comme ça, vous allez tout vous tâcher!

(il fallut attendre une heure avant que quelqu'un aide le malheureux à se lever).
Je vous épargne le scandale qui s'est passé à l'agence mais c'est du même ordre, quoique légèrement plus destructeur (ils en ont eu pour 490 pa de réparation du mobilier et pour 2po600 de soins médicaux).

Finalement il avait apprit que dame Améthiste s'en était partit pour la Moria. C'est qu'elle galope pour une courte sur pattes! Khrung partit donc pour les terres de Houssaille avec son compagnon Beolho. Des elfes, des arbres, des orques, des trolls et des tréants...encore un coin à faire brûler!

A chacun de ses entretiens avec les autochtones locaux, il en apprenait un peu plus sur le passage de la hobitte. Une fois à Echad Eregion, on lui parla du passage jusqu'à la Moria et d'une musicienne particulièrement talentueuse qui avait séjourné quelques jours avec eux avant de partir. La description pouvait correspondre mais en même temps, elle ne traitait que 2 points... "Une blonde à forte poitrine".

Il était sur la bonne route.